« Boots » : comment une série gay sur les Marines est-elle devenue le phénomène Netflix d’octobre 2025
Écrit par Jérôme Patalano - Publié le 23 octobre 2025 - 🕐 5 minutes
Avec 9,4 millions de vues sur la deuxième semaine d’exploitation, et sa place de deuxième série la plus regardée au classement mondial de la plateforme, « Boots » s’impose comme l’un des cartons inattendus de Netflix en octobre 2025.
Au grand dam de la Maison-Blanche… qui a involontairement contribué à son succès. C’est ce qu’on appelle : le karma.
Ce qui sera abordé :
« Boots », créée par Andy Parker et inspirée du livre-mémoire « The Pink Marine » de l’ancien Marine Greg Cope White, raconte l’histoire de Cameron Cope, un adolescent gay de Louisiane qui s’enrôle sur un coup de tête dans le corps des Marines avec son meilleur ami, Ray McAffey.

La série se déroule en 1990, à une époque où être ouvertement homosexuel dans l’armée américaine constituait non seulement un motif de renvoi, mais également un délit pénal. Produite par Sony Pictures Television et Act III Productions, cette comédie dramatique en huit épisodes bénéficie du dernier crédit de producteur exécutif du légendaire Norman Lear, décédé en décembre 2023, en plein tournage de la série.
La rage du Pentagone a boosté l’audience de la série
Une semaine après la sortie de la série, la porte-parole du Pentagone Kingsley Wilson a publié un communiqué cinglant qualifiant les productions de Netflix de « déchet woke », déclarant que sous l’administration Trump et le secrétaire Pete Hegseth, l’armée américaine « restaure l’éthos guerrier et ne compromettra pas ses standards pour satisfaire un agenda idéologique ».
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Découvrez ce livreSur les réseaux sociaux, la réaction des internautes n’a pas tardé. Plusieurs utilisateurs ont ironisé sur la déclaration du Pentagone, l’un d’eux demandant s’il n’y avait pas de choses plus importantes à traiter au Pentagone que de jouer les critiques de séries, tandis qu’un autre soulignait que le show est basé sur les mémoires d’un vétéran et déplorait l’époque où la Maison-Blanche ne ressentait pas le besoin de se plaindre des programmes télévisés. Certains fans ont même plaisanté en affirmant qu’ils devaient absolument regarder la série maintenant.
Loin de nuire à la série donc, cette attaque gouvernementale a fonctionné comme un formidable coup de pub. La série a ainsi vu son audience doubler en deuxième semaine, passant de 4,7 millions à 9,4 millions de vues, et de 27,5 millions à 55,2 millions d’heures visionnées.

Un triomphe critique qui fait consensus
Sur Rotten Tomatoes, « Boots » affiche un score impressionnant de 93 % d’approbation de la part des critiques, et même 88 % du côté du public.
Un consensus critique qui souligne que la prestation de Miles Heizer a été à la hauteur de cette sympathique comédie dramatique « qui explore la masculinité et la queerness avec un effet puissant ».
Les critiques saluent l’équilibre entre humour mordant et moments de profonde émotion, la série parvenant à traiter de sujets graves sans jamais sombrer dans le pathos.

SPOILERS — Du livre à l’écran : les libertés prises avec « The Pink Marine » (avec la validation de l’auteur)
« The Pink Marine », livre-mémoire publié en 2015, raconte l’histoire autobiographique de Greg Cope White, qui a rejoint les Marines en 1979 avec son meilleur ami Dale après avoir entendu « summer » et « camp » lorsqu’on lui a parlé de « boot camp ». Le mémoire, préfacé par Norman Lear, a reçu des éloges de personnalités comme Jane Lynch, David Hyde Pierce et Margaret Cho.
À ce jour, le livre n’a pas été traduit en français, restant uniquement disponible en version anglaise sur les plateformes internationales. La série opère plusieurs changements majeurs par rapport au livre original. Le plus significatif concerne la période : alors que Greg Cope White s’est enrôlé en 1979, « Boots » se déroule en 1990, juste avant la guerre du Golfe, renforçant ainsi les enjeux narratifs.
Parmi les autres modifications, la série invente plusieurs personnages clés : le sergent Sullivan, Ray McAffey qui remplace Dale, et Jones, l’autre Marine gay qui offre une possibilité de romance pour Cameron. La série ajoute aussi des éléments dramatiques, comme la mort d’une recrue pendant l’entraînement, événement qui ne figure pas dans le livre.
Greg Cope White, impliqué comme producteur exécutif et scénariste, a insisté sur quelques piliers essentiels : l’inclusion de l’amitié qui l’a aidé à survivre et le rôle transformateur du Corps des Marines dans sa vie, malgré les politiques discriminatoires de l’époque. La série se termine sur une note d’ouverture vers un potentiel conflit militaire, là où le mémoire s’achève simplement sur la cérémonie de remise des diplômes.

Max Parker, l’autre révélation de la série
Si Miles Heizer, qu’on a découvert en adolescent torturé prêt à commettre l’irréparable dans la série « 13 reasons why », porte la série, l’acteur britannique Max Parker crève littéralement l’écran dans le rôle du sergent Sullivan, un instructeur impitoyable qui cache un secret…
Parker a confié récemment au magazine Gay Times qu’il s’agissait de son premier rôle majeur aux États-Unis, une véritable percée après des années de carrière principalement au Royaume-Uni.
L’acteur de 33 ans, connu pour ses rôles dans la série britannique « Emmerdale » et dans « Vampire Academy » sur Peacock, a passé huit tours d’auditions pour décrocher le rôle, se décrivant lui-même comme « clairement le choix risqué ». Ouvertement gay depuis une interview accordée au magazine Attitude en 2021, Max Parker a révélé que son expérience personnelle l’a aidé à construire le personnage de Sullivan, même si les enjeux pour son personnage étaient infiniment plus élevés.
La sortie de « Boots » marque un tournant dans sa carrière. Sur les réseaux sociaux, les fans ne tarissent pas d’éloges sur sa prestation, sa présence magnétique et la complexité qu’il apporte à un personnage qui n’aurait pu qu’être un stéréotype d’instructeur militaire brutal.
« Boots » prouve une fois de plus qu’en 2025, les histoires queers dans des contextes historiquement hostiles trouvent leur public, malgré les attaques politiques. La série ne se contente pas de raconter l’histoire d’un jeune homme gay dans les Marines : elle explore la fraternité, la résilience et la quête d’appartenance dans un système conçu pour vous briser. Avec des performances exceptionnelles, une réalisation soignée et une bande-son pop queer des années 80 et 90 qui fait mouche, « Boots » s’impose comme l’une des séries les plus importantes de l’année.
Le pari de Netflix est réussi, et on espère déjà une saison 2 pour continuer à suivre Cameron et ses frères d’armes dans la tempête du Désert qui s’annonce.

Jérôme Patalano est un auteur édité et auto-édité de romans d’imaginaire, feel-good et thrillers, avec des personnages queers, et consultant free-lance en communication digitale.
Enfant des années 80 et ado des années 90, la pop-culture a toujours guidé sa vie, jusqu’à la création de plusieurs médias comme Poptimist, mag de pop-culture queer (et pas que).




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